Le hova chez les Betsileo
Le mot hova a trois significations en fonction des régions. C'est
ce qu'affirme Clovis Ralaivola.
Dans la première, en Imerina, le terme désigne une classe
sociale à part, placée entre la classe régnante des
nobles Andriana et celle des esclaves Andevo; il est donc synonyme de
roturier. En hiérarchisant les deux classes Andriana et Hova, Andrianampoinimerina
déclare: "Le Hova ne doit jamais régner. S'il y a mariage
entre un Hova et une Andriana, celle-ci transmet tous ses droits à
ses enfants...".
Beaucoup plus tard, à un billet qui lui est adressé et portant
l'en-tête: "A Sa Majesté, Reine des Hovas", Ranavalona
1ère répond par une fin de non recevoir: "Je ne suis
pas seulement la Reine des Hova, mais de tous les Merina!".
Pour tous les côtiers et les étrangers, en effet, le mot
hova évoque toute une ethnie, constituée par les habitants
de l'Imerina.
Troisième signification, chez les Betsileo, notamment dans le Sud
de la Matsiatra, hova indique le souverain et, par extension, andriana.
L'histoire établit que, lorsque le Vakinankaratra est annexé,
le royaume de Manandriana, au Nord de la Matsiatra, est le premier à
reconnaître l'autorité d'Andrianampoinimerina.
A l'instar ou à l'instigation de ce dernier, un Roi de Manandriana
unifie les multiples fiefs de la région et parvient à les
regrouper en trois royaumes ou principautés: Isandra, Lalangina
et Arindrano. ce souverain est connu alors sous l'appellation de Hova.
"C'est ainsi que ce vocable a fait son chemin pour désigner
les souverains betsileo et, par la suite, les nobles".
Selon Clovis Ralaivola, de toutes les hypothèses avancées,
celle qui attribue à ce terme un mobile politique merina en vue
de déchoir les souverains betsileo au rang des Hova, simples sujets
en Imerina, semble être la plus vraisemblable. "La portée
politique d'une telle action psychologique n'échappa pas aux souverains
merina. N'ont-ils pas débaptisé certaines villes ou places
conquises pour leur donner d'autres noms significatifs, tels que Tsiroanomandidy
(il n'y a pas deux qui commandent) à l'Ouest de Tananarive, Tsianolondroa
(qui n'appartient pas à deux), quartier de Fianarantsoa?".
Poursuivant son analyse, Clovis Ralaivola soutient que l'hypothèse
attribuant au mot hova une origine océanienne (haou ou houa), dont
les seuls Betsileo conserveraient le sens de chef, peut être écartée
par le fait qu'aucun nom des souverains connus de cette tribu n'en est
composé. "Alors que le mot andriana a servi d'élément
de formation onomastique à des souverains de diverses tribus de
l'Ile".
Par contre, selon toujours l'auteur, le nom propre Haova y est commun
et se donne au garçon né un jour d'Alahamady, ou la première
lune de l'année malgache. "C'est le meilleur signe zodiacal
chez les Malagasy, aussi est-il appelé le zodiaque des Andriana.
C'est le Martien, le guerrier invincible. C'est dans cette opinion que
le mot océanien haou trouverait peut-être ses explications".
Ainsi pour Clovis Ralaivola, le vocable hova n'est connu chez les Betsileo
qu'à une époque récente. Et, d'après lui,
il est inconcevable que ces derniers alignent délibérément
les esclaves affranchis à leurs souverains en les appelant "Hovavao"
(nouveaux Hova) alors que les roturiers sont connus chez eux sous le nom
de "Olompotsy" (hommes blancs).
"L'acceptation de cette nouvelle expression, quelque peu outrageante
ne semble que peser en faveur du caractère extradialectal du mot
hova chez les Betsileo, tribu où la pratique discriminatoire en
faveur des Andriana demeure en vogue de nos jours" (1967). Effectivement,
lors des funérailles, par exemple, au cours desquelles on abat
des bœufs, les Andriana sont les premiers servis et avec les meilleurs
morceaux provenant de la croupe, partie traditionnellement réservée
à leur rang. "Par tâche d'huile, ce mot a été
adopté par certaines tribus voisines du Sud, qui l'utilisent dans
certaines expressions". Telles que "ampelakova" pour femme
du souverain, "fondakova" pour suite du souverain, "zanakova"
pour vassaux.
Pour terminer cette partie de son étude, Clovis Ralaivola identifie
le mot hova en le rattachant à des mots de la même famille,
issus des racines "ofa", "ofi", "ofo" et
"ova", et même "avi" et "ovo" qui,
précise-t-il, marque le détachement, un état accessoire,
mais aussi une idée de liberté, d'indépendance.
Pela Ravalitera journal l'Express |