Andriamandresy ou l'ancêtre de la dynastie Antesaka (Antaisaka)
Avec tout son clan, le jeune prince sakalava Repila est arrivé, il y a fort longtemps, au village de Tsiarepioky, à la suite d'un long voyage sur la vaste plaine opulente qui borde la rivière sakalava. C'est dans la région de Mahabo, en pays Menabe. Passé à l'âge adulte, il change de nom et se fait appeler Ihazorango. Puis, convaincu de sa prochaine élévation au trône, il adopte le nom d'Andriamandresiarivo.
Cependant, il est trop rigide et hautain et le suffrage du peuple, à la mort du roi Andriamisara, démolit tous ses espoirs: la couronne est dévolue à son frère cadet, Andriandahifotsy. Déçu et furieux, Andriamandresy va vivre avec son oncle. Mais comme on dit, « chassez le naturel, il revient au galop » : il occupe de force la rizière de son oncle, le blesse mortellement quand celui-ci l'en chasse et doit quitter le pays de ses ancêtres, chassé cette fois par sa mère.
Andriamandresy, guerrier réputé et redouté, s'en va, mais il se fait accompagner d'hommes à majorité des combattants bien trempés, les Fanafolahy, et d'esclaves.
C'est ainsi que Théodore Raharijaona explique, dans une étude publiée en 1967, un exode sakalava qui donnera naissance, plus tard, à la dynastie des Antesaka issus des Sakalava.
Un soir, au cours de son exode vers le Sud-Est, Andriamandresy et sa suite arrivent près de Samborano dont les habitants s'occupent de remplacer leur défunt roi Ndremifidy. Il y envoie en éclaireur l’un de ses hommes qui discute alors avec le fils aîné du roi disparu, Ndrahoditra. Le cas de ce dernier est en tous points identique à celui d'Andriamandresy puisqu'il est lui aussi supplanté par son cadet.
De colère, il décide d'accompagner Andriamandresy dans son voyage, passant par le village de Nosibe où Ndramilovoky règne sur les Tehamory, avant d'arriver à Vohibola où réside Ramarovahiny, roi des Andramaro.
À la vue d'Andriamandresy, avec au front une plaque d'argent, vêtu de soierie écarlate et d'un pagne de franges étincelantes sur les deux bouts qui descendent jusqu'au mollet, Ramarovahiny et ses sujets sont « partagés entre l'admiration et l'inquiétude ». Cependant, Andriamandresy ne lui cache pas qu'il est un roi déchu des Sakalava et qu'il cherche où se fixer.
Ramarovahiny met alors à sa disposition un vaste domaine en rapport avec son rang et il montre sa reconnaissance par des dons aux sujets qui le servent. En outre, afin de retenir « ce généreux visiteur dont les moindres faits et gestes les persuadent de sa noble provenance », il lui offre comme épouse sa fille unique, Ratsiavela, dont il est d'ailleurs fort épris.
Un jour celle-ci, enceinte, éprouve le grand désir de manger du riz « vatomandry », mais on n'en trouve que sur le territoire de Vorokotsy, habité par les Sahafero. Andriamandresy y dépêche un homme pour s'en procurer, mais le roi Rakaby accompagne son refus de propos cruels: « Si l'on ne compte que sur mon vatomandry, la femme n'aura que le temps d'avorter. »
Courroucé, Andriamandresy décide de châtier ce roi, et s'y prépare activement en faisant tailler des bambous à bout tranchant, confectionner des mortiers à l'expédition. « L'attaque fut déclenchée à minuit par un temps épais de ténèbres. Les bambous furent plantés devant chaque porte tandis que les mortiers étaient posés partout où passeront les habitants quand ils sortiront de chez eux. Au même moment, de nombreux guerriers encerclaient la résidence occupée par le roi Rakaby pour qu'il ne s'échappe pas. » Un coup de fusil donne le signal de l'assaut, en même temps que le feu est mis sur le toit des cases.
Réveillés en sursaut, les habitants sont mortellement blessés soit par les bambous tranchants, soit par chute due aux mortiers, d'autant plus violente qu'elle est décuplée par la précipitation. De Vorokotsy, il ne reste que des décombres et le roi Rakaby reçoit un coup fatal de sagaie.
Quelques mois plus tard, des émissaires sakalava viennent le chercher pour le ramener. Il sait que sa vie est en danger, mais il les suit confiant sa femme à ses beaux-parents et ses hommes. Elle lui donne un fils, Ratsietry qui ne le connaîtra jamais. Plus tard, celui-ci est marié à Isanatry, d'origine Zaranambola (Ihorombe) et à sa cousine Tokonolo. C'est la naissance de la dynastie antesaka Zarabehavana et Zaramanampy.
L’origine des quatre grands clans antesaka
Dès sa naissance, Ratsietry, fils d’Andriamandresy, est entouré des soins que recommande son père avant son départ et donc sa mort. Cela contribue beaucoup à sa santé et à sa croissance. Et malgré sa jeunesse, on lui donne deux épouses. La première, Isanatry présentée par sa famille, lui propose une seconde femme Tokonolo, car elle se sent seule loin de son clan. Isanatry donne le jour à Tsamo Ramanombily qui sera l'aïeul des Zarabehavana, et Tokonolo enfante Fizema. À son tour, celui-ci prend deux épouses, la « vadibe » étant Tomboeva qui engendre les Zaramanampy, les Zarafanilihana et les Zaratonda ainsi qu'une fille unique, Rasoefa. La « vadimasay », Iantimila, accouche des Zaranitana et d'une fille unique, Soafeno. Selon Théodore Raharijaona (« Les Antaisaka, des origines à nos jours », 1967), les Zarabehavana, les Zaramanampy, les Zarafanilihana et les Zaranitana constituent les quatre grands clans qui forment le peuple antesaka. Plus tard, les descendants de Ratsietry se multipliant, ils se séparent en quête d'endroits plus vastes et plus favorables. Ainsi Tsamo Ramanombily et sa famille suivent la Mananara en aval, tandis que Fizema et son clan se dispersent sur les rives de la Mananivo, de la Manambato et de la Sanalaotra. L'exode de Tsamo Ramanombily le conduit jusqu'à Nosiambo, village déjà habité par les Tenosiambo. Mais son fils aîné Indramarolona préfère s'installer en face de l'Iombo, affluent de la Mananara, près de Vilanivaky. Il a neuf enfants. Le paisible séjour d'Indramarolona subit un jour la brusque et meurtrière invasion des Sahafatra et des Andrahofika. Ce jour-là du côté des assiégés, de très lourdes pertes humaines et matérielles sont enregistrées et parmi les morts, la fille d'Indramarolona, Iseny. Les survivants s'enfuient à Baipoaka laissant leurs ennemis libres de piller et d'incendier leur « riante et florissante agglomération ». Lorsque ces derniers se sont retirés, ils retournent vers leur ville pour ensevelir leurs morts, même si les lieux sont devenus inhabitables. « Depuis, les Zarabehavana utilisent cet endroit comme tombeau, après lui avoir donné le nom de Faseny (tombeau d'Iseny) conservé jusqu'à nos jours. Nulle part ailleurs dans tout Vangaindrano, aucun bâtiment sépulcral n'est mieux construit que celui qui y est élevé aujourd'hui. » Puis de Baipoaka, ils se dirigent vers l'Est jusqu'à Karimbolo, non loin de l'actuel Vangaindrano. Le village est déjà occupé par les sujets de Ratsifofo et Ratsitohana, dont la capitale est Vatomasy. En ce temps-là, la région est couverte d'une immense forêt dense. « Il n'était pas permis aux aborigènes de savoir que des étrangers étaient venus s'infiltrer sur leur territoire. De leur côté, ceux-ci ignoraient du tout au tout que le pays avait ses propres occupants. » Un jour, les chasseurs de sangliers des deux camps se retrouvent nez à nez à Mariany. Après un moment de stupeur et de méfiance, ils se posent des questions sur leur provenance respective. De leur long entretien naît une confiance réciproque. Les immigrés conduisent les anciens occupants au roi Indramarolona qui leur offre un grand festin. Les jeunes gens des deux clans se voient souvent. À la fin, ceux du pays soumettent aux nouveaux venus le projet de déchoir Ratsifofo et Ratsitohana. Les deux rois auraient commis des actes qui frisent la cruauté, mais leurs sujets n'osent pas se soulever contre eux. Les immigrés se rallient aux insurgés, « se délectant déjà à la perspective d'une fructueuse bataille ». Indramarolona refuse cependant d'employer la force pour réussir et recourt à la ruse qui se révèle par la suite très efficace. Il s'approche de Ratsifofo et de Ratsitohana avec beaucoup d'égards jusqu'à offrir un grand nombre de bœufs. Ce qui endort la méfiance des deux rois et permet à ses hommes d'investir Vatomasy et de s'infiltre jusque dans les cases. Devant ce fait accompli, Ratsifofo et Ratsitohana doivent s'enfuir à Itampena pour rassembler leurs sujets et chasser les intrus. Mais ils sont vite vaincus et s'enfuient vers le village qu'ils vont créer dans la forêt. Le site invisible n'est perçu que par la fumée qui en sort et Indramarolona et ses gens l'appelleront « Tsihitatrano ».
Pela Ravalitera
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